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Faut-il bien vivre pour être heureux ?

Publié le 27/02/2008

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Que de fois l?indisposition du corps a détourné d?excès où aurait fait tomber une santé parfaite, etc. ! Bref, il est incapable de déterminer avec une entière certitude d?après quelque principe ce qui le rendrait véritablement heureux : pour cela il lui faudrait l?omniscience. [?] Il suit de là que les impératifs de la prudence, à parler exactement, ne peuvent commander en rien, cad représenter des actions d?une manière objective comme pratiquement nécessaires, qu?il faut les tenir plutôt pour des conseils que pour des commandements de la raison ; le problème qui consiste à déterminer d?une façon sûre et générale quelle action peut favoriser le bonheur d?un être raisonnable est un problème tout à fait insoluble ; il n?y a donc pas à cet égard d?impératif qui puisse commander, au sens strict du mot, de faire ce qui rend heureux, parce que le bonheur est un idéal, non de la raison, mais de l?imagination, fondé uniquement sur des principes empiriques, dont on attendrait vainement qu?ils puissent déterminer une action par laquelle serait atteinte la totalité d?une série de conséquences en réalité infinie? »   Kant, « Fondements de la métaphysique des m?urs ».     L?objet de la « Dialectique » de la raison pure pratique, c?est le souverain bien , défini comme l?accord de la vertu et du bonheur, dont nous avons besoin en tant qu?êtres doués d?une sensibilité. La vertu et le bonheur sont liés dans le concept du souverain bien. Par suite, il faut déterminer la nature de cette liaison, de cette unité. Ou bien elle est analytique et il faut affirmer l?identité de la vertu et du bonheur ; ou bien elle est synthétique et il faut dire alors que la vertu engendre le bonheur. Les deux grandes écoles morales de l?antiquité, stoïcisme et épicurisme, ont adopté le principe commun de l?identité du bonheur et de la vertu, mais elles l?ont conçu de façons différentes. Tous deux se trompaient en ceci qu?ils considéraient l?unité du concept de souverain bien comme analytique, alors qu?elle est synthétique ; en d?autres termes, leur erreur commune était de considérer comme identiques deux éléments hétérogènes ou du moins de regarder l?un des deux comme faisant partie de l?autre : « Le stoïcien soutenait que la vertu est tout le souverain bien et  que le bonheur n?est que la conscience de la possession de la vertu, en tant qu?appartenant à l?état du sujet. L?épicurien soutenait que le bonheur est tout le souverain bien ?et que la vertu n?est que la forme de la maxime à suivre pour l?acquérir, cad qu?elle ne consiste que dans l?emploi rationnel des moyens de l?obtenir.

« sont pas les choses, mais seulement l'opinion que nous en avons.

Et c'est là l'origine de nos troubles, de nossouffrances, de nos malheurs.

Épictète l'affirme :« Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions qu'ils en ont [...] Lors donc que noussommes traversés, troublés ou tristes, n'en accusons pas d'autres que nous-mêmes, c'est-à-dire nos opinions»(Manuel, V ).Mors, mis en garde contre le trouble (taraxé), nouspourrons, comme le sage, écarter de nous les opinions vides et atteindre la véritable sagesse.

En effet, chez lesstoïciens, la vie du sage parvenu au sommet de la perfection consiste à jouir d'une constante et complète ataraxie(a — taraxé, c'est-à-dire absence de trouble).

Mais parvenir à de tels sommets, ce n'est pas, comme on le croitparfois hâtivement, se retirer du monde, ou plus simplement manifester une vague indifférence sceptique.

Certes,celui qui progresse vers la sagesse donne parfois l'image d'un homme à l'écart du monde :«Il ne blâme personne, il ne loue personne, il ne se plaint de personne, il n'accuse personne, il ne parle pas de luicomme s'il était quelque chose, ou qu'il sût quelque chose ; quand il trouve quelque obstacle ou quelqueempêchement à ce qu'il veut, il ne s'en prend qu'à lui-même» (Manuel, XLVIII).Mais l'homme en marche vers la sagesse doit, plus profondément, et plus difficilement sans doute, être « en accordavec lui-même », ce qui en réalité est la même chose qu'être en conformité avec la nature, puisque l'homme, commetout être vivant, fait partie de la nature.

Cette conformité va de soi pour l'animal.

Mais pour l'homme, lorsqu'il quittel'enfance, elle ne se fait plus spontanément.

Lorsqu'elle se produit, ce ne peut être qu'à la suite d'un choix réfléchi :« Aux êtres raisonnables, la raison a été donnée en vue d'une fonction plus parfaite ; aussi, pour les hommes, vivreselon la nature devient vivre selon la raison » (Diogène Laêrce, Livre VII, 86).Connaître sa propre nature, pour l'homme, c'est reconnaître qu'il y a en lui une faculté capable « d'avoir conscienced'elle-même, de sa nature, de son pouvoir, de la valeur qu'elle apporte en venant en nous », en bref, c'estreconnaître l'existence de la Raison (Épictète, Entretiens, Livre I, Chap.

1). Dès lors, la paix intérieure, gage du bonheur que la sagesse nous permet d'atteindre par un effort soutenu etconstant, coïncide avec la compréhension de la marche du monde.

Soumettre les choses à nos désirs, tel est lepropos de l'insensé : cela n'a pas de sens, parce que tout simplement cela n'est pas possible.

Alors, puisque leschoses sont plus fortes que tout, convient-il de soumettre son propre désir aux choses qui adviennent, enatténuant, voire même en annulant nos désirs ? Tel est d'ailleurs le thème que l'on retrouvera beaucoup plus tard,presque mot pour mot, sous la plume de Descartes, lorsque dans la troisième partie du Discours de la méthode il estamené à composer sa morale provisoire :« Ma troisième maxime était de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs quel'ordre du monde, et généralement de m'accoutumer à croire qu'il n'y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir quenos pensées.

» Cela convient au penseur lorsqu'il entreprend sa démarche vers le vrai.

Mais le sage, lui, n'oppose plus les désirs etles choses.

Ce qu'il désire, ce sont les choses telles qu'elles adviennent, et il sait en même temps que les choses quiadviennent ne peuvent être que conformes à ses désirs, puisque tout ce qui vient n'arrive que selon l'ordreuniversel.

Si bien que le sage en vient à proclamer : non seulement j'obéis aux dieux, mais j'approuve.Avec Épictète, s'il est donné à l'homme de « vouloir que les choses arrivent comme elles arrivent », il lui est, aussiet surtout, donné de « faire que tout événement lui apparaisse comme il le veut ».

N'est-ce pas, en effet, le regardque nous portons sur les choses qui leur donne une signification ? Ce qui compte, avant tout, chez l'homme, n'est-ce pas sa vie intérieure, ce qui est en lui, au dedans de lui ? N'est-ce pas la connaissance et la volonté libre quiorientent l'homme à l'intérieur de lui-même vers la sagesse, dans l'indifférence à l'égard de ce qui se passe àl'extérieur ? Dès lors, tout ce qui se passe à l'extérieur ne peut-il pas apparaître à l'homme comme il le veut ? Danscette affirmation de l'autonomie du sujet face au monde extérieur, il y a, sans doute, un aspect positif.

Enparticulier lorsque nous sommes confrontés à ce qui ne dépend vraiment pas de nous et qui pourrait nous troubler. Reste, cependant, que la morale prônée par Epictète n'est qu'une morale négative contre le monde et les hommes,dont il se désintéresse.

Faute de pouvoir changer l'ordre du monde, le stoïcien se réfugie dans « la pure universalitéde la pensée ».

C'est aussi une morale abstraite, car le stoïcien pense mais n'agit pas.

Son moi reste avec lui-même.Il s'oppose au monde, se retire dans la pensée, mais ne lutte pas pour transformer les choses. Enfin, la troisième discipline, dite de l'action, consiste à agir en vue du bien commun ; si j'accepte le destin, je dois moi-même y contribuer puisque la nature de l'homme commande qu'il intervienne dans la cité, parmi lesautres.

Je dois donc vouloir faire le bien et même si mon action était interrompue, par la mort ou autre chose, ellen'en serait pas pour autant inachevée, car l'essentiel réside dans l'intention. Ce qu'il faut retenir, c'est que ces trois disciplines (ou règles de vie) forment les lignes directrices d'une vie vertueuse, qui comprend qu'il n'existe que de mal moral ; autrement dit, le mal n'existe que dans le jugement que nous formulons sur les choses et non dans les choses.

Une fois cela compris, nous pouvons atteindre l'ataraxie,c'est-à-dire un état de l'âme où nous ne sommes plus troublés par quoi que ce soit ; en d'autres termes, le bonheurselon les stoïciens.

II – Kant : la morale sans bonheur Pour les Stoïciens, la vie vertueuse, ordonnée au bien, coïncide donc avec la vie heureuse.

À l'inverse, pourKant, la morale n'est pas l'occasion du bonheur ; en effet, si bien vivre signifie être moral, la pureté de l'intention. »

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