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En quoi la religion peut-elle rendre possible la paix ?

Publié le 06/03/2009

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En quoi la religion peut-elle rendre possible la paix ?

 

Il peut sembler d’abord que la paix est une affaire d’Etat et non de religion. En effet, la paix, en son sens politique, peut être définie comme un état durable de sécurité et de concorde entre les hommes et, par extension, entre Etats. Elle est établie et maintenue généralement par des textes (lois, traités de paix), entretenue par des échanges (commerciaux, de savoirs), mais aussi parfois par des dispositifs de dissuasion (armée, postes aux frontières, missiles etc.). Qu’il y ait un lien, un rapport, donc, entre religion et paix ne va pas de soi.

Pourtant, à y regarder de plus près, la religion établit, par l’intermédiaire de croyances et de pratiques partagées, une communauté et un accord entre les hommes : or l’accord entre les hommes est justement ce qui constitue la première condition de la paix. Ainsi, la religion, loin d’être sans rapport avec la paix, la rendrait au contraire possible, en créant un état d’accord entre les hommes.

Mais il y a dans la réalité quelque chose qui vient directement contredire cette affirmation : l’existence passée ou présente des « guerres de religion «. Nous sommes alors face à une contradiction : la religion semble constituer un terrain favorable tout à la fois à la paix et à la guerre. Pour comprendre et dépasser cette contradiction, il semble nécessaire de ne pas se limiter aux faits (la paix d’une communauté et les guerres de religion), mais de chercher ce qui, dans la religion telle qu’elle est en droit et non seulement en fait, peut créer les conditions de possibilité de la paix. Le problème est alors le suivant : à quelles conditions la religion peut-elle rendre possible la paix. Quel pouvoir doit avoir la religion pour rendre possible la paix ?

Cette question implique d’interroger les rapports entre la religion et le pouvoir politique : la religion, pour permettre la paix, doit-elle prendre part au pouvoir politique, s’y substituer, ou au contraire s’en détacher ? Est-ce en tant que la religion devient un véritable « pouvoir « qu’elle « peut « rendre possible la paix ? 

 

 

I . La religion entre guerre et paix

 

II . La religion ramenée à la raison

 

III . L’irrationalité fondamentale de la religion : comment en user pour la faire contribuer à l’instauration de la paix.

 

 

 

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« Kant, La religion dans les limites de la simple raison . A. Ce qui dans la religion conduit à la querelle, c'est tout ce qui déborde la raison.

Ainsi, chercher à démontrerl'existence de Dieu est peine perdue, car cela dépasse les limites de notre connaissance.

Quelles sont ces limites ?Ce sont celles de l'expérience possible.

Donc tout ce qui est hors de cette expérience possible est à proscrirecomme ne constituant pas le cœur de la religion, comprise comme religion rationnelle.

On enlève ainsi, dans lareligion, l'importance des dogmes ; car il est vain de se demander si le corps et le sang du Christ sont vraiment dansle pain et le vin, vu qu'on n'a aucune chance de pouvoir le savoir rationnellement.

Mais si l'on enlève à la religiontout ce qu'elle a d'indémontrable, que reste-t-il ? Il reste, écrit Kant dans La Religion dans les limites de la simple raison , les principes, la discipline, en un mot la morale religieuse.

Car cela, la raison nous l'enseigne aussi, et cherche à nous faire tendre vers le Bien.

La raison (pratique et non théorique) nous apprend que l'existence de Dieuest nécessaire afin que nos actions soient jugées, et notre vertu récompensée.

Toute la religion n'a alors de sensque lorsqu'elle fait tendre les hommes vers le Bien.

C'est pourquoi Kant reconnaît dans la religion chrétienne unereligion « rationnelle » au sens où elle nous prescrit d' «aimer notre prochain comme nous-même ».

Finalement,toute la superstition (où il faudrait « faire plaisir » à Dieu) est vaine, seule la religion de la raison est vraie et peutprétendre unir universellement les hommes, car tous possèdent la raison.

Cependant, il est vrai que rarement leshommes écoutent tous leur raison.

Nous y reviendrons. Ricoeur : la religion écartée du pouvoir et inscrite dans un cadre de discussion laïque – la Tolérance. B. L'irrationalité de la religion est avant tout celles des hommes.

Il semble donc idéal de supposer une religionrationnelle.

Mais comment, alors, espérer faire de la religion un facteur de paix si elle garde son irrationalité ? C'estpeut-être en lui ôtant les moyens de créer de véritables tensions, et en lui refusant l'accès au pouvoir politique.C'est ce que propose Ricoeur, dans La Critique et la Conviction. La religion doit être insérer dans un Etat et une société laïque.

L'Etat s'abstient de se prononcer en faveur de telle ou telle religion ; ainsi il ne peut être mis auservice d'une religion pour en opprimer une autre.

Une guerre entre Etats ne peut plus naître, dans ces conditions,de querelles religieuses.

En plus de cette abstention ou laïcité de l'Etat, Ricoeur distingue une autre laïcité : celle dela société.

Dans ce cas, la laïcité désigne le fait qu'on établisse une discussion publique, un échange d'idées, oùtoutes les opinions doivent être respectées.

Autrement dit, on doit admettre qu'on ne peut pas tous être d'accord,entendre les arguments des uns et des autres, et les respecter, même si on n'est pas du même avis.

La religionprend ainsi place dans un cadre rationnel, celui d'un échange d'arguments, mais on ôte à la religion son pouvoir denuire.

Ricoeur emprunte à Rawls la notion de « désaccord raisonnable » : on peut ne pas être d'accord, avoir desreligions différentes ou même des points de vue différents sur la même religion, sans que cela nuise à la paixgénérale qui est encadrée par un Etat neutre, laïque, et une société fondée sur la libre discussion, le respect desopinions, ce qu'on peut nommer la « tolérance »Kant et Ricoeur encadrent tous deux la religion par la raison : Kant en défendant une religion née de la raison :Ricoeur en encadrant l'irrationalité et le pouvoir de la religion dans un cadre rationnel.

Dans les deux cas,l'irrationalité de la religion est supposée pouvoir être encadrée par la raison : mais est-ce seulement le cas ? Lespassions religieuses ne sont-elles pas trop fortes pour qu'on puisse s'en tenir à un simple échange d' « arguments »sans avoir aussi envie de se battre pour ses idées ? III .

L'irrationalité fondamentale de la religion : comment en user pour la faire contribuer à l'instauration dela paix.

On peut, à bon droit, supposer que tenter de maîtriser l'irrationalité de la religion n'est peut-être pas toujours unmoyen sûr d'éviter les querelles, voire les guerres, car la religion est une passion humaine, pas une simple croyanceà laquelle on attache pas de réelle importance.

Plutôt que maîtriser cette passion (et risquer qu'elle ne se rebellequand on essaie de la contenir), il faudrait savoir l'utiliser en vue de la paix.Spinoza, dans le Traité Théologico-politique , affirme qu'un bon gouvernement des hommes ne se fait pas uniquement par la raison (même si un accord des hommes par la raison est nécessaire), car les hommes sont des êtres depassion, qui ne suivent pas toujours ce que leur prescrit leur raison.

Par exemple, on peut savoir rationnellementqu'il est interdit de voler, mais notre besoin ou notre convoitise peut néanmoins nous pousser à voler.

C'est parceque les hommes suivent aussi leurs désirs irrationnels que le gouvernement des hommes doit savoir utiliser cespassions, les tromper, pour le bien de la République.

Mais comment ? La religion peut y aider, de deux façons.D'abord, elle enseigne aux hommes d'imiter la Justice et la Charité divines.

De cette façon, les hommes sont poussésau bien non plus seulement par leur raison, mais par une forte croyance religieuse.

D'autre part, le souverain doitcertes gouverner rationnellement mais aussi savoir faire peur ; et c'est ce que permet aussi en un sens la religion,par ces châtiments, et par le Jugement dernier.

Finalement, le droit divin et les principes religieux (justice etcharité) sont mis au service de l'ordre publique, de la paix.L'irrationalité de la religion, ce qui en fait une passion, est ici utilisé.

On ne cherche pas à l'encadrer ou à lasupprimer, mais à l'exploiter, dans toute sa force.

C'est peut-être dans de telles conditions, et avec beaucoup deprécautions, que la religion peut être le plus à même de contribuer à la paix entre les hommes.. »

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