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Doit-on délimiter le pouvoir de la technique ?

Publié le 30/06/2010

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technique

Pour autant, on ne peut pas faire abstraction de ce que la technique nous a apporté de bon. Ne pourrait-on pas redéfinir la technique en la mettant en perspective avec un impératif moral ? La technique nous a ouvert de nouvelles perspectives : elle a donc posé de nouveaux enjeux. Si l'impératif catégorique moral kantien ne peut plus correspondre à ces nouveaux enjeux, ne peut on pas en envisager de nouveaux, qui correspondent à l?ère postmoderne que la technique a fait advenir ? III. Il faut domestiquer la technique ensauvagée pour répondre au nouvel impératif catégorique que celle-ci appelle. La puissance technologique moderne créé un type de problème éthiques inconnus jusqu?à ce jour. Dans L'Ethique de la responsabilité, Jonas appelle cela la « transformation de l?essence de l'agir humain. La technique moderne fonctionne selon une logique cumulative : Jonas parle d?inertie dynamique. La puissance technologique impose les conditions de son maintien et de son renforcement.

technique

« Cette planification à outrance, ce dirigisme qui règne sur tous les districts de l'étant, ne veut pas dire pour autant que l'homme serait le maître ni même l'organisateur de ceprocessus d'exploitation planétaire.

Loin d'être entre les mains de l'homme, la technique, en tant qu' arraisonnement , tient l'homme en son pouvoir.

: « ...

il y a longtemps que les puissances qui, en tout lieu et à toute heure, sous quelque forme d'outillage que ce soit, accaparent et pressent l'homme, le limitent et l'entraînent, il y a longtemps queces puissances ont débordé la volonté et le contrôle de l'homme, parce qu'elles ne procèdent pas de lui ».

L'homme n'est pas le sujet mais le « fonctionnaire » de la technique.

Les dirigeants, les technocrates, contre l'arbitraire desquels il est devenu monnaie courante de s'indigner, ne sont eux-mêmes que les « ouvriers » requis pour mettre en sûreté la totalité de l'étant et qui ont reçu pouvoir de décision pour cela.De plus, la technique suscite elle-même les besoins qui vont lui permettre d'accroître sa domination.

Il serait illusoire de croire, en particulier, que les avancées technologiquestravailleraient à l'avènement d'une vie plus heureuse sur cette terre.

Cette croyance est cependant soigneusement entretenue, car elle permet de justifier la poursuite del'exploitation organisée de l'étant.Il est devenu courant, à vrai dire, de dénoncer les dangers liés aux développements de la technique et les risques que son usage incontrôlé fait peser sur l'humanité.

toutefois,ce ne sont pas les productions de la technique elles-mêmes, ni même leur utilisation qui sont dangereuses pour Heidegger , mais d'abord et avant tout l'essence de la technique elle-même, c'est-à-dire le comportement provoquant qui régit désormais le rapport de l'homme à l'étant.

La technique moderne, au sens de l' arraisonnement , attaque l'homme qui « à l'intérieur du sans-objet, n'est plus que le commentant du fonds » et devient lui-même un « fonds ».

Elle met l'homme en péril, non seulement parce que les moyens techniques rendent désormais possible une destruction de l'espèce humaine tout entière, mais parce qu'elle menace, de manière bien plus profonde, l'essencepensante de l'homme, c'est-à-dire son rapport à l'être.N'ayant affaire qu'à un fonds, l'homme moderne s'érige en « maître & possesseur de la nature » au point qu'il peut lui sembler qu'il ne rencontre plus partout que lui-même,qu'il n'y a plus rien qui ne soit ou qui ne puisse être en son pouvoir.

Il s'agit là en réalité de la plus grande illusion car « aujourd'hui l'homme précisément ne se rencontre plus lui-même en vérité nulle part, c'est-à-dire qu'il ne rencontre plus son être ».

l'homme, qui saisit toutes choses et lui-même du point de vue de la pensée calculante, s'en tient à l'étant sur lequel il cherche à exercer sa domination, et ne se préoccupe plus de ce qui devrait le concerner plus que tout autre chose, c'est-à-dire de l'être lui-même.L'agression contre tout ce qui est culmine dans la tentative aujourd'hui engagée pour maîtriser la vie elle-même qui devient un produit comme un autre qu'on cherche àmanipuler ou à transformer.

Cette agression contre la vie et contre l'être même de l'homme est plus inquiétante aux yeux de Heidegger que l'hypothèque d'une destruction qui pèse sur la planète, ne serait ce que parce qu'elle est généralement passée sous silence.

« Au regard de cette agression, l'explosion d'une bombe à hydrogène ne signifie pas grand-chose », car ce n'est pas seulement l'homme qu'elle menace d'anéantir mais son essence. L'essence de la technique est le danger, mais tant que ce danger reste dans l'ombre, il n'y a aucune raison pour que la domination de la technique cesse.

En le démasquant eten le stigmatisant, Heidegger prépare les conditions d'une libération de l'homme à l'égard de l'emprise de la technique.

Cette libération ne veut pas dire un abandon pur & simple des choses techniques, mais une modification de notre rapport avec elles.

Au lieu d'être fascinés par elles, nous pouvons, tout en nous en servant normalement,conserver une certaine distance à leur endroit.

« Nous pouvons dire « oui » à l'emploi inévitable des objets techniques, mais en même temps « non », en ce sens nous les empêchions de nous accaparer et ainsi de fausser, brouiller et finalement vider notre être ».

Cette attitude qui consiste à dire à la fois oui et non au monde technique est ce que Heidegger appelle « sérénité » , « égalité d'âme ».

Libéré des mirages de la technique, l'homme est alors disponible pour entendre l'appel de l'être ou de l'avènement dont le rapport technique à la réalité ne peut que le détourner.Les beaux-arts peuvent au sein de l'époque de l'extrême obscurcissement de l'être, reconduire les mortels égarés sur la terre dévastée par la technique dans le domaine de lavérité de l'être et préparer les conditions d'un nouvel enracinement.

L'art n'est à même, toutefois, de remplir cette fonction « salvatrice » que si l'homme est capable d'entrer dans une relation suffisamment originaire à l'oeuvre d'art, ce qui suppose se soit déjà libéré de l'emprise de la technique.

On ne quitte donc la technique qu'en accomplissantun « saut », celui-là même à la faveur duquel la pensée parvient à sortir du domaine de la métaphysique dont la technique est issue.

« La philosophie a toujours renversé les apparences.

Heidegger, à son tour, montre que la technique n'est pas ce qu'elle offre de plus apparent, comme les moteurs ou lesengins.

Elle n'est pas non plis un simple instrument entre les mains de l'homme.

«L ‘essence de la technique n'est absolument rien de technique.

»Le projet à l'oeuvre dans la technique est un projet métaphysique, parce qu'il concerne tous les secteurs de la réalité et non pas seulement les machines.

Il marque l'étant entotalité.

La technique a le trait de l'être.

C'est elle qui ramène à l'unité une multiplicité de phénomènes épars, que l'on a tendance à considérer simplement comme les signesd'une « crise de civilisation ».Chacun connaît ces signes : l'uniformisation planétaire des modes de vie et de pensée ; la mobilisation constante de l'activité culturelle et artistique ; le déracinement et laneutralisation de l'espace et du temps ; une certaine insensibilité à l'égard de l'excès de douleur (on pourrait ajouter le fait que guerres ou catastrophes deviennent desspectacles télévisés) ; la perte du sentiment de la proximité en même temps que de celui de la distance, abolie par les moyens rapides de transport et de communication ; lacirculation rapide de l'information sans autre but qu'elle-même ; la constitution de stocks immenses d'énergie comme de moyens énormes de destruction ; parallèlement laconsommation accélérée, au prix de la dilapidation des ressources naturelles ; la politique aux ordres de la bureaucratie et de la planification, etc.

[...]Deux des phénomènes les plus apparents de l'époque : la science moderne et l'Etat totalitaire, qui semblent la gouverner, ne sont pourtant que des « conséquencesnécessaires » de la technique.

Heidegger nous invite à remonter à la cause véritable.

La science qui poursuit la mathématisation de la nature n'est pas un projet autonome.Elle décide d'avance du réel ; n'admet que l'objectivable et le calculable.

Elle est au service du projet plus général du Dispositif technique (Gestell) et répond à une nécessitéde son essence.

« C'est parce que l'essence de la technique moderne réside dans le Dispositif que cette technique doit utiliser la science exacte de la nature.

Ainsi naîtl'apparence trompeuse que la technique moderne est de la science naturelle appliquée.

» L'opposition apparence/essence opère ici d'une façon presque classique, presqueplatonicienne.

De même l'Etat totalitaire, ou la « politique dirigée » - la manipulation de l'opinion publique par la propagande par exemple – ne sont que des « conséquences »d'une nécessité d'essence.

Aussi, écrit Heidegger, est-il vain d'accuser les Fuhrer, ou les grands technocrates, et de s'indigner contre eux, car ils ne sont des « causes » qu'« en apparence ».

« En vérité, ils représentent les conséquences nécessaires du fait que l'étant est passé dans le mode de l'errance.

» Michel HAAR , « Le chant de la terre ». Si l'on considère que la technique est aliénante par essence, il faudrait non pas délimiter son pouvoir mais l'annihiler complètement.

Pour autant, on ne peut pas faire abstraction de ce que latechnique nous a apporté de bon.

Ne pourrait-on pas redéfinir la technique en la mettant en perspective avec un impératif moral ?La technique nous a ouvert de nouvelles perspectives : elle a donc posé de nouveaux enjeux.

Si l'impératif catégorique moral kantien ne peut plus correspondre à ces nouveaux enjeux, nepeut on pas en envisager de nouveaux, qui correspondent à l'ère postmoderne que la technique a fait advenir ?III.

Il faut domestiquer la technique ensauvagée pour répondre au nouvel impératif catégorique que celle-ci appelle.La puissance technologique moderne créé un type de problème éthiques inconnus jusqu'à ce jour.

Dans L'Ethique de la responsabilité, Jonas appelle cela la « transformation de l'essence del'agir humain.La technique moderne fonctionne selon une logique cumulative : Jonas parle d'inertie dynamique.

La puissance technologique impose les conditions de son maintien et de son renforcement.

Latechnique s'est ensauvagée.

Il faut donc l'apprivoiser à nouveau.

Cette indispensable domestication de la technique ensauvagée exige une autolimitation, volontariste et dure, de la croissance.Il faut donc prendre conscience de l'horizon catastrophique futur des dérives de la technique.

Il s'agit d'envisager une nouvelle responsabilité, non pas axée sur une fait actuel, mais sur unepeur d'un futur que l'on ne maîtrise pas et que l'on ne peut prévoir à coup sûr.

L'impératif catégorique nouveau repose sur le devoir de préserver un droit de préservation de l'homme illimité.IV.

Le danger de la technique réside ans son essence même.

"Quand nous considérons la technique comme quelque chose de neutre, c'est alors que nous lui sommes livrés de la pire façon : car cette conception, qui jouit aujourd'hui d'une faveur touteparticulière, nous rend complètement aveugles en face de l'essence de la technique." Heidegger, La Question de la technique, 1953.La technique dépossède l'homme de lui-même, elle l'arrache à l'être.

En effet, la plupart des gens considèrent la technique à travers la notion de progrès.

Il est indéniable qu'une rage de dentsou une migraine sont aujourd'hui immédiatement soignées, ce qui n'était pas le cas au temps de Descartes.

Mais l'essence de la technique, pour Heidegger, ne peut se ramener au concept deprogrès.

La place de la technique dans le monde moderne est le signe d'un oubli de la question de l'être.

Réduite à son rôle d'instrument, la technique revêt une sorte de neutralité, nécessaireà la vie, alors qu'en fait elle joue le rôle d'un deus ex machina.Le développement accéléré et envahissant de la technique dans le monde moderne oblige à repenser les rapports que l'homme entretient avec elle : primitivement instrument de l'homme, latechnique semble en effet en passe de faire de l'homme son instrument.

Aussi est-ce au moyen de se libérer de la technique tout en l'utilisant que nous invite à réfléchir Heidegger. « Nous pouvons utiliser les objets techniques et nous en servir normalement, mais en même temps, nous en libérer, de sorte qu'à tout moment nous conservions nos distances à leur égard.Nous pouvons faire usage des objets techniques comme il faut qu'on en use.

Mais nous pouvons, du même coup, les laisser à eux-mêmes comme ne nous atteignant pas dans ce que nousavons de plus intime et de plus propre.

Nous pouvons dire "oui" à l'emploi indispensable des objets techniques et nous pouvons en même temps lui dire "non", en ce sens que nous lesempêchions de nous accaparer et ainsi de fausser, brouiller et finalement de vider notre être.

Mais si nous disons ainsi à la fois "oui" et "non" aux objets techniques, notre rapport au mondetechnique ne devient-il pas ambigu et incertain ? Tout au contraire.

Notre rapport au monde technique devient, d'une façon merveilleuse, simple et paisible.

» ordre des idées1) Une idée centrale : Nous pouvons utiliser les objets techniques sans être asservis par eux.2) Explicitation : Nous pouvons utiliser ces objets en les maîtrisant, c'est-à-dire- en les maintenant dans leur statut d'objet, c'est-à-dire séparés de nous-mêmes, n'atteignant pas notre être, notre intimité ;. »

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