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DESCARTES: Imagination et intellection

Publié le 27/02/2008

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descartes
Je remarque premièrement la différence qui est entre l'imagination et la pure intellection, ou conception. Par exemple, lorsque j'imagine un triangle, je ne le conçois pas seulement comme une figure composée et comprise de trois lignes, mais outre cela je considère ces trois lignes comme présentes par la force et l'application intérieure de mon esprit ; et c'est proprement ce que j'appelle imaginer. Que si je veux penser à un chiliogone, je conçois bien à la vérité que c'est une figure composée de mille côtés, aussi facilement que je conçois qu'un triangle est une figure composée de trois côtés seulement, mais je ne puis pas imaginer les mille côtés d'un chiliogone, comme je fais les trois d'un triangle, ni pour ainsi dire, les regarder comme présents avec les yeux de mon esprit. Et quoique suivant la coutume que j'ai de me servir toujours de mon imagination, lorsque je pense aux choses corporelles, il arrive qu'en concevant un chiliogone, je me représente confusément quelque figure, toutefois il est très évident que cette figure n'est point un chiliogone, puisqu'elle ne diffère ement de celle que je me représenterais, si je pensais à un myriagone, ou à quelque autre figure de beaucoup de côtés ; et qu'elle ne sert en aucune façon à découvrir les propriétés qui font la différence du chiliogone d'avec les autres polygones. Que s'il est question de considérer un pentagone, il est bien vrai que je puis concevoir sa figure, aussi bien que celle d'un chiliogone, sans le secours de l'imagination ; mais je la puis aussi imaginer en appliquant l'attention de mon esprit à chacun de ses cinq côtés, et tout ensemble à l'aire, ou à l'espace qu'ils renferment. Ainsi je connais clairement que j'ai besoin d'une particulière contention d'esprit pour imaginer, de laquelle je ne me sers point pour concevoir ; et cette particulière contention d'esprit montre évidemment la différence qui est entre l'imagination et l'intellection ou conception pure.DESCARTES


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« Cet argument suffit dans la mesure où la connaissance se fait selon les critères de clarté et de distinction qui nouspermet de ne pas confondre une chose avec une autre.

Or nous sommes incapables de distinguer précisément lechilio gone figure à mille côté du myriagone figure à dix mille côtés ! « puisque elle ne diffère nullement de celle queje me représentais si je pensais à un myriagone ou à quelque autre figure de beaucoup de côtés et qu'elle ne serten aucune façon à découvrir les propriétés qui font la différence du chilio gone d'avec les autres polygones ».

Parconséquent, la limitation de la puissance représentative de l'imagination est confirmée par son incapacité irréductibleà saisir le chilio gone.

III L'imagination exige une contention d'esprit que ne nécessite nullement l'entendement _ La pensée de l'imagination est beaucoup plus limitée que la pensée conceptuelle de l'entendement.

Aussil'entendement possède une puissance représentative infiniment supérieure par rapport à celle limitée del'imagination.

C'est la raison pour laquelle l'imagination se voit reléguée à un rôle d'auxiliaire secondaire dans laconnaissance.

L'entendement se passe très bien de l'imagination : « Que s'il est question de considérer unpentagone, il est bien vrai que je puis considérer sa figure aussi bien que celle d'un chilio gone , sans le secours del'imagination ».

Néanmoins, si je veux considérer un pentagone, je ne suis pas forcé de passer par la conception del'entendement, je peux aussi me servir de mon imagination puisque le nombre limité de côtés du pentagone ne metpas en échec sa puissance représentative : « mais cela puis aussi bien imaginer en appliquant l'attention de monesprit à chacun de ses cinq côtés, et tout ensemble à l'aire ou à l'espace qu'ils renferment »._ Si pour me représenter le pentagone par l'imagination, j'ai besoin d'appliquer l'attention de mon esprit, il n'en estpas de même pour l'entendement : « ainsi je connais clairement que j'ai besoin d'une particulière contention d'espritpour imaginer, de laquelle je ne me sers point pour concevoir ».

Or cette différence de contention d'esprit estfondamentale dans la mesure où « elle montre évidemment la différence qui est entre l'imagination et l'intellection ouconception pure ».

Comment expliquer alors cette différence entre les deux facultés? Et tout d'abord qu'est ce quela contention d'esprit ? C'est l'attention de l'esprit qui doit s'appliquer à une chose qui n'est pas lui..

En effet nousne devons être attentifs u'à ce qui échappe par nature à notre esprit et non pas ce qui le constitue lui-même._ Comment expliquer alors cet effort d'attention que nécessite l'imagination et pas l'entendement ? C'est quel'imagination n'est pas seulement une faculté de l'esprit, mais une faculté de l'esprit en tant qu'il est uni au corps.Ainsi l'opération de l'imagination nous fait conjecturer l'existence des corps parce qu'elle est tournée vers autrechose que soi lorsque l'esprit est tournée vers lui-même.

C'est ce ue l'on peut soutenir en se référant à une citationun peu postérieure à notre texte : « l'esprit en concevant, se tourne en quelque sorte vers soi-même et considèrequelqu'une des idées qu'il a en soi ; mais en imaginant il se tourne vers les corps »; Conclusion : Si l'entendement n'a pas la même force de présentation que l'imagination, il possède néanmoins une puissancereprésentative supérieure à cette dernière et il ne nécessite pas la même attention dans la mesure où lorsquel'esprit conçoit, il n'est tourné que vers lui-même.

Par opposition, l'imagination est une faculté de l'âme qui est unieaux corps et est tournée vers les corps extérieurs.

Dans la mesure où sa définition implique l'existence des chosescorporelles, la définition de l'imagination constitue une étape supplémentaire dans le processus de reconstruction dumonde accompli par Descartes depuis la troisième méditation.. »

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