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Dans quelle mesure le développement de la télévision vous paraît-il devoir modifier les conditions de la communication entre les hommes ?

Publié le 16/06/2009

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INTRODUCTION. - Rapidement, depuis quelques années, les services de la télévision établissent sur les hauteurs du pays des relais grâce auxquels bientôt il n'y aura plus un coin d'où nous ne puissions, non seulement entendre ce qui se passe au loin, mais encore le voir. Le grand public se réjouit de la possibilité qui lui est ainsi offerte d'assister de son fauteuil à des spectacles pour lesquels on s'imposait naguère de longs et coûteux déplacements. Mais, voyant plus loin, le philosophe, ou plus exactement le psychologue et le moraliste, se demandent quels seront, sur les communications entre les hommes, les effets du développement de la télévision. La question fait songer avant tout à la communication qui peut s'établir entre le spectateur et les acteurs ou autres personnages vus sur l'écran; mais elle intéresse également les rapports mutuels de l'ensemble des hommes dont la communication sera plus ou moins modifiée par la présence, dans la salle de séjour, d'un poste récepteur dont les images mouvantes attirent les regards.

« n'en est pas de même de ces derniers, qui sont tout entiers à l'action en cours.

La communication est unilatérale;elle ne s'effectue que dans un sens. C.

— Fusion. Lorsque la communication s'effectue dans les deux sens, il est pratiquement difficile de distinguer exactement lesdeux composantes qu'y distingue l'analyse.

Dans la conversation de deux amis intimes, par exemple, il n'y a pas un «moi e et un « toi e communiquant par un échange de paroles ou de gestes expressifs.

Ils constituent ensemble un «nous » ayant son psychisme propre, sans qu'on puisse faire le départ entre ce qui vient de l'un et ce qui vient del'autre.

C'est alors, lorsqu'elle devient communion, que se réalise pleinement l'idée de communication.Nous n'avons pas besoin de dire que les relations qui peuvent s'établir entre les spectateurs de la télévision et lespersonnes qui paraissent sur l'écran ne pourront jamais atteindre ce niveau ni même en approcher.Ce n'est donc pas la télévision qui nous procurera des conditions favorables à la communication avec ceux qu'ellenous fait voir.

Sans doute, donne-t-elle au spectateur une certaine familiarité avec l'aspect physique des vedettesde l'écran, et par là même constitue une première approche.

Mais il manque encore l'essentiel qui est la rencontreen tête a tête.

Il faut que l'acteur ou la personnalité qui s'exhibe en public se laisse voir à moi en privé, que je metrouve avec eux comme je me trouve au milieu des spectateurs. II.

— DE SPECTATEUR A SPECTATEUR. Le récepteur de télévision plus encore que le récepteur de radio depuis longtemps familier introduit dans nosintérieurs une foule de personnages.

Quel sera l'effet de cette présence sur les relations personnelles des membresd'une même communauté, et principalement d'une même communauté familiale ?Suivant le mot de Maurice NÉDONCELLE, l'unité de communication est la dyade, c'est-à-dire qu'on ne peutcommuniquer pleinement qu'à deux.

Par là même n'y a-t-il pas incompatibilité entre télévision et communication ? A.

— La communication peut être sauvegardée. L'incompatibilité n'est qu'apparente, car ce ne sont pas des personnes réelles qu'introduit la télévision, maisseulement leurs images.

Ces images ne peuvent être comparées à une présence étrangère, témoin indiscret ouregard inquisiteur auquel rien n'échappe.

Elles ne nous gênent guère plus que les tableaux accrochés au mur.

Leschansonnettes que nous déverse en sourdine l'appareil de radio n'empêchent pas les conversations intimes .

cen'est pas de voir le jeu de la cantatrice qui les suspendra. B.

— Parfois même élargie. L'écran de la télévision peut en effet devenir un centre d'intérêt commun à un plus ou moins grand nombre et par làmême favoriser la communication. D'abord au foyer familial.

La télévision peut devenir capable d'y retenir ceux qui, auparavant, allaient chercher desdistractions au dehors.

Ensuite grâce à elle les membres de la famille sont amenés à vibrer à l'unisson; elle leurfournit sans cesse des thèmes nouveaux à échange de vues qui peuvent évoluer vers l'authentique communication.Nous, pouvons observer un résultat analogue sur le plan national et même international.

Grâce à la télévision, lesgrands événements du pays et du monde seront vécus, au moment même où ils se dérouleront, par la grande massesinon par l'humanité entière; cette communion mettra ceux qui en feront l'expérience dans les dispositionsfavorables à d'ultérieures communications de personne à personne. C.

— Mais elle risque de devenir superficielle. C'est en effet de personne à personne, au sein de la dyade, que s'effectue la communication véritable.

Or il est fortà craindre que la télévision soit défavorable à la constitution de cette réalité morale.Admettons que, pendant une notable partie de leurs loisirs, parents et enfants se trouvent rassemblés autour del'écran pour suivre la transmission d'un match ou d'une conférence.

La belle affaire, si, les goûts ou les idées variantd'un âge ou d'un caractère à l'autre, ce spectacle fournit à ces divergences une occasion nouvelle de se manifester,de s'accuser ! Dans bien des cas ne serait-il pas préférable, pour la bonne entente, que chacun suive son goût, parexemple, visites ou promenades pour les parents, et pour les enfants, sortie avec une troupe de scouts ? Les uns etles autres ne se trouveraient-ils pas, au retour, mieux disposés pour une véritable communication ?D'ailleurs on comprendrait fort mal la communication si l'on prétendait y parvenir à coup sûr par des procédésartificiels, par exemple en suscitant des rencontres pour échanger des vues sur un thème qui intéresse tous lesparticipants.

Sans doute, pour communiquer il faut d'abord se rencontrer, et cette rencontre peut avoir pouroccasion un congrès ou la table ronde d'un débat amical.

Mais le stade de la communication véritable n'est atteintque si, oubliant l'objet de la réunion, je ne vois plus que l'autre ou plutôt le tout que je forme avec lui.

Le retour àl'objet, alors, marquerait la fin de la communication.

Par suite, au sein d'une famille ou d'une communauté analoguedans laquelle la rencontre est faite depuis longtemps, la communication ne saurait s'établir à la faveur des thèmesde causeries que fournit l'écran.

Du moins ne sera-ce jamais qu'une communication superficielle et qui empêchera lesapprofondissements qui peut-être seraient effectués sans cela. CONCLUSION. - Il en est de la télévision comme de la plupart des progrès dus à la technique: elle est ambivalente. Aussi partisans et adversaires peuvent aligner en sa faveur ou contre elle des remarques d'une indiscutable valeur.. »

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