Cours de philosophie: LE TRAVAIL ET LES ECHANGES ?
Publié le 11/03/2009
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L'homme est le seul être vivant à travailler. Cela signifie qu'il organise consciemment l'univers en transformant son environnement, ceci en utilisant à la fois son cerveau et ses mains dans le cadre d'un projet. En ce sens le travail établit une rupture entre le monde de la nature et celui de la culture. Comme le fait remarquer Marx, il y a une différence essentielle entre l'abeille qui construit sa ruche en suivant son instinct et l'architecte qui pense "dans sa tête" l'édifice qu'il va construire. On peut donc suggérer que le travail s'inscrit toujours dans un cadre psychologique, social et économique. Ne peut-on pas dire que si le travail crée des richesses, il est aussi un mode de communication entre les hommes ? Ce qui est produit par le travail fait l'objet d'une circulation, d'échanges symboliques dans les sociétés sans écriture et économiques dans les sociétés modernes. Le travail semble une des spécificités de l'être humain. Il crée des richesses mais aussi un monde humain. C'est en dépassant par le travail la simple réalité matérielle que l'homme se constitue comme sujet humain à part entière. Sans cela il serait prisonnier de ses déterminations biologiques et condamné à se répéter. L'histoire humaine est le résultat d'une double négation comme le souligne à bon droit Bataille. Négation du sujet qui refuse son statut d'être biologique soumis aux lois de la vie, et négation de la nature, de ce qui est de l'ordre de l'immédiat. Par exemple, si le besoin de se nourrir détermine la sensation de faim, il ne nous dit pas ce que nous devons manger. L'homme ne cesse d'inventer de nouveaux mets, de nouvelles façons de les préparer, ce qui montre la part de liberté qui définit ses activités. Sans ce mouvement par lequel le sujet humain tend inlassablement à se dépasser, il lui serait impossible d'envisager un avenir.
«
Le travail se distingue essentiellement du jeu par ceci que le résultat y importe plus que les moyens.
Travailler, c'estproduire, créer, et l'homme, en travaillant, transforme la nature et se transforme lui-même.
I.
DONNÉES SOCIOLOGIQUES
- A - Travail et civilisation.
Comte voyait dans le travail humain « la réaction utile de l'homme contre sa destinée» (Catéchisme positiviste).
Par le travail, en effet, l'homme fait servir la nature à ses propres fins (cf.
Marx : le travail est « la réalisation dans lanature» des fins de l'homme) et s'élève ainsi au-dessus de la condition animale.
Le travailleur pouvant produire plusqu'il ne consomme et les produits obtenus pouvant se conserver au-delà du temps nécessaire à leur reproduction, letravail permet l'accumulation des richesses qui est la condition même de la civilisation.
- B - La division du travail.
La constitution d'un capital rend possibles les échanges et engendre la division du travail.
Celle-ci permet d'assouplirla «solidarité mécanique » qui caractérise, selon Durkheim, les sociétés les moins évoluées, et de lui substituer une«solidarité organique», caractéristique des sociétés modernes.
Et les progrès de la division du travail, assurant ladifférenciation des individus, sont à l'origine, sans doute, du respect de la dignité individuelle et du culte de lapersonne.
- C - L'évolution du travail.
Mais l'évolution du travail, dans les temps modernes, a eu notamment deux conséquences qui modifientprofondément les rapports de l'homme et du travail.
D'une part, en effet, les progrès techniques permettent àl'homme de produire beaucoup plus en travaillant moins (cf.
la notion de «révolution industrielle»), d'autre part, cesmêmes progrès font que les conditions du travail deviennent de plus en plus inhumaines (taylorisation, travail à lachaîne, etc.
cf.
G.
Friedmann .
Le travail en miettes).
C'est le sens même du travail humain qui se trouve aujourd'hui mis en question (G.
Friedmann .
Où va le travail humain ?).
II.
PROBLÈMES PHILOSOPHIQUES
- A - La condition des travailleurs.
Selon Marx, l'existence même du capital, au sens précis du terme, c'est-à-dire la propriété privée des instrumentsde production, entraîne l'exploitation de l'homme par l'homme, le prolétaire étant contraint de vendre à vil prix saforce de travail pour le grand profit du capitalisme (théorie de la plus-value).
En dehors même du marxisme, qui voitla solution dans l'abolition du capital, de nombreux penseurs estiment que de profondes réformes sont nécessairespour que l'agent humain de la production, c'est-à-dire le travailleur, ne soit pas traité comme une chose(«association capital-travail», «participation», «autogestion», etc.
).
- B - La civilisation du travail.
D'une manière générale, on peut s'interroger sur la place que devrait tenir le travail dans une vie vraiment humaine.Nietzsche, déjà, regrettait que la civilisation moderne du travail enlevât à l'homme la possibilité et le goût de laméditation.
D'autre part, le souci d'un rendement toujours accru est à l'origine de la «société de consommation»dans laquelle de nouveaux besoins sont perpétuellement et artificiellement créés, détruisant la «dimensionintérieure» de l'homme et engendrant «la pensée et les comportements unidimensionnels» (Marcuse).
- C - L'homme et le travail.
On arrive ainsi à ce paradoxe que le travail, qui est le propre de l'homme, apparaît de plus en plus comme inhumainet, certes, il y a beaucoup à faire pour les conditions du travail et la condition des travailleurs soient plus conformesà la dignité de l'homme.
Il ne faut pas oublier que la nature est aveugle et indifférente et que l'homme n'a de prisessur elle que par le travail, mais il ne faut pas oublier non plus que «produire n'est pas une fin ; c'est une vie humainepour tous qui est la fin » (Alain).
CONCLUSION
L'enfant est étranger au monde du travail et là est peut-être l'origine de l'idée d'un paradis perdu.
Mais si le travailest la condition même de l'homme, il ne doit pas être pour lui une malédiction..
»
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