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Baruch SPINOZA: L'esclave et l'homme libre

Publié le 10/04/2005

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spinoza
On pense que l'esclave est celui qui agit par commandement et l'homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela cependant n'est pas absolument vrai, car en réalité être captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c'est le pire des esclavages, et la liberté n'est qu'a celui qui de son entier consentement vit sous la seule conduite de la Raison. Quant à l'action par commandement, c'est-à-dire à l'obéissance, elle ôte bien en quelque manière la liberté, elle ne fait cependant pas sur-le-champ un esclave, c'est la raison déterminante de l'action qui le fait. Si la fin de l'action n'est pas l'utilité de l'agent lui-même, mais de celui qui la commande, alors l'agent est un esclave, inutile à lui-même. Baruch SPINOZA

QUESTIONNEMENT INDICATIF    • Que signifie « cela n'est pas absolument vrai «? Cela signifie-t-il que c'est totalement faux ou que c'est vrai à une certaine condition, relativement à une condition ?  • A quelle(s) condition(s) peut-on être « vraiment « libre selon Spinoza ?  • En quoi peut-on dire, selon Spinoza lui-même, que l'obéissance « ôte bien d'une certaine manière la liberté «?  • En quoi « c'est la raison de l'action «... qui « rend immédiatement esclave « ?  • Quel est le sens de « sujet « ici ?  • Pourquoi, selon Spinoza, chacun dans l'État « qui se soumet à la droite raison « « peut y être libre «?  Y est-il nécessairement « libre «?  • Pourquoi, finalement, « l'État le plus libre est celui qui se soumet à la droite raison «?  • Que pensez-vous de l'argumentation et de la thèse de Spinoza ? Sur quoi est-elle fondée, en dernière analyse ?  • Qu'est-ce qui est en jeu dans ce texte ?  — En quoi présente-t-il un intérêt proprement philosophique ?

spinoza

« Réponses: 1 - À vivre sous la conduite de la raison, sans être esclave de ses plaisirs ni de ses désirs, sans vivre sous ladomination d'autrui.2 - Uniquement si le but de l'action commandée concerne l'intérêt exclusif de celui qui commande, plutôt quel'intérêt de tous ou de celui qui est commandé.3 - Parce qu'il est incapable de rien comprendre ni de rien accomplir qui lui soit vraiment utile. QUESTIONNEMENT INDICATIF • Que signifie « cela n'est pas absolument vrai »? Cela signifie-t-il que c'est totalement faux ou que c'est vrai à unecertaine condition, relativement à une condition ?• A quelle(s) condition(s) peut-on être « vraiment » libre selon Spinoza ?• En quoi peut-on dire, selon Spinoza lui-même, que l'obéissance « ôte bien d'une certaine manière la liberté »?• En quoi « c'est la raison de l'action »...

qui « rend immédiatement esclave » ?• Quel est le sens de « sujet » ici ?• Pourquoi, selon Spinoza, chacun dans l'État « qui se soumet à la droite raison » « peut y être libre »?Y est-il nécessairement « libre »?• Pourquoi, finalement, « l'État le plus libre est celui qui se soumet à la droite raison »?• Que pensez-vous de l'argumentation et de la thèse de Spinoza ? Sur quoi est-elle fondée, en dernière analyse ?• Qu'est-ce qui est en jeu dans ce texte ?— En quoi présente-t-il un intérêt proprement philosophique ? Dans un texte consacré aux thèmes de l'esclavage et de la liberté, Spinoza se demande si les définitions communes de ces deux réalités sont pertinentes, c'est-à-dire si l'esclavage consiste dans l'obéissance et la libertédans le bon plaisir.

A travers cette question, il soulève deux problèmes conjoints : l'indépendance suffit-elle pour sedire libre, puisqu'on peut devenir l'esclave de ses plaisirs ? La soumission sociale fait-elle esclave, puisqu'il ne semblepas que tous ceux qui obéissent soient déclarés tels ? Ces deux problèmes se ramenant ainsi à un seul : y a-t-il dessoumissions légitimes? En prenant en compte à la fois les mobiles de l'action d'un point de vue psychologique et lesfins de cette action du point de vue de ces bénéficiaires, Spinoza va s'opposer à l'opinion en soutenant qu'il existedes soumissions légitimes parce qu'elles rendent libres, lorsque c'est à la Raison que l'on se soumet, ou parcequ'elles sont utiles à ceux qui sont soumis, et ce, en critiquant successivement les définitions de l'homme libre et del'esclave donnée par l'opinion.

Une fois cette double thèse expliquée, nous tâcherons d'en éprouver la pertinence. L'auteur énonce d'emblée l'opinion commune qu'il a pour objectif de corriger.

" On pense que l'esclave est celui quiagit par commandement et l'homme libre celui qui agit selon son bon plaisir." Ainsi que l'indique l'expression " onpense ", Spinoza ne propose pas ici "sa" définition de l'esclavage et de la liberté, mais expose la définition communede ces deux choses.

Aussi pouvons-nous déjà anticiper sur la suite de son propos : il s'agira pour lui de critiquer cesdéfinitions, critiquer, c'est-à-dire au sens strict séparer, distinguer ce qui dans ces définitions a de la valeur de cequi n'en a pas.

L'opinion commune se représente et distingue l'esclavage et la liberté d'un point de vue social : selonelle, l'esclave est celui qui obéit à un autre, tandis que l'homme libre est celui qui n'obéissant à personne peut fairece qu'il veut, comme on dit.

A savoir : agir à sa guise, n'écouter que lui-même, et par là, jouir sans entraveextérieure de tout ce qui s'offre à lui.

Ces définitions ne manquent ni de vraisemblance, ni de cohérencepuisqu'effectivement celui qui est soumis à un autre n'est pas libre de faire ce que bon lui semble, tandis que celuiqui ne dépend de personne en a le loisir.

Il faut noter en outre d'une part qu'une telle définition de l'homme libren'exclut pas qu'il puisse exercer un pouvoir sur d'autres, et surtout, d'autre part qu'ainsi compris, l'esclavagerecouvre un très grand nombre de relations humaines : au-delà de la relation bien connue entre un maître et unesclave, il se retrouverait partout où sous une forme quelconque il existe un pouvoir, une autorité, une hiérarchiepar lesquels un être agit sous le commandement d'un autre.

En d'autres termes, l'opinion fait consister la libertédans l'indépendance sociale et l'esclavage dans la dépendance, la soumission, l'obéissance. " Cela cependant n'est pas absolument vrai ".

Sans nier que ces définitions comprennent quelque chose d'exact,Spinoza entame sa critique en contestant leur caractère absolument exact.

Cela signifie qu'il va les nuancer et lescompléter, et ce, en deux temps distincts, chacun étant consacré à une des deux réalités en question. L'homme libre n'est pas vraiment celui qui agit selon son bon plaisir, " car en réalité être captif de son plaisir etincapable de rien voir ni faire qui nous soit vraiment utile, c'est le pire esclavage ".

Cet argument de Spinozaconsiste non pas tant à nier comme telle la définition commune de l'homme libre, mais à changer de point de vue :ce n'est pas du point de vue social qu'il se situe, mais du point de vue psychologique.

Reprenant les termes mêmesde cette définition, il montre que ce que l'on tient pour de la liberté du point de vue des relations avec les autresest une forme d'esclavage du point de vue de la relation à soi-même.

Pourquoi ? Parce que celui qui n'agit que selonson bon plaisir, n'agit, n'entreprend quelque chose que s'il espère en tirer un plaisir.

Le seul mobile de ses actionsest donc la satisfaction de ses désirs.

Or, ce souci exclusif pour le plaisir l'aveugle et le rend inapte à agir non pasen vue de son plaisir, mais en vue de ce qui lui est utile.

Non que le plaisir soit en lui-même inutile, puisque Spinoza. »

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