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Aristote: Homme et politique

Publié le 17/04/2009

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aristote
«Il est manifeste, (…), que l'homme est par nature un animal politique, et que celui qui est hors cité, naturellement bien sûr et non par le hasard des circonstances, est soit un être dégradé soit un être surhumain, et il est comme celui qui est injurié en ces termes par Homère : "sans lignage, sans loi, sans foyer". Car un tel homme est du même coup naturellement passionné de guerre, étant comme un pion isolé au jeu de trictrac. C'est pourquoi il est évident que l'homme est un animal politique plus que n'importe quelle abeille et que n'importe quel animal grégaire. Car, comme nous le disons, la nature ne fait rien en vain ; or seul parmi les animaux l'homme a un langage. Certes la voix est le signe du douloureux et de l'agréable, aussi la rencontre-t-on chez les animaux ; leur nature, en effet, est parvenue jusqu'au point d'éprouver la sensation du douloureux et de l'agréable et de se les signifier mutuellement. Mais le langage existe en vue de manifester l'avantageux et le nuisible, et par suite aussi le juste et l'injuste. Il n'y a en effet qu'une chose qui soit propre aux hommes par rapport aux autres animaux : le fait que seuls ils aient la perception du bien, du mal, du juste, de l'injuste et des autres notions de ce genre.» Aristote, La politique, Livre I, Chap. 2
C'est sa nature et sa différence avec les autres animaux. Il l'est par nature, c'est-à-dire que cette différence, l'homme la doit à la nature en tant qu'elle a produit cette nature de l'homme. Que signifie cette formule? Que l'homme vit en société, qu'il est sociable, que par nature il est disposé à vivre avec ses semblables? Sans doute, mais cette lecture est insuffisante pour plusieurs raisons : - On pourrait en dire autant de certains animaux, comme les abeilles ou les fourmis, qui elles aussi vivent en société et selon une organisation sociale complexe et efficace. Or, la socialité est présentée par Aristote comme une différence spécifique. Ce qui indique que la sociabilité n'est pas du même ordre chez l'homme que chez les animaux, qu'entre celle des hommes et celle des animaux il y a une différence de nature et non de degré.


aristote

« 2 ) L'homme est un animal doué de parole Aristote après avoir montré que l'homme est un animal politique invoque une autre différence entre l'homme et lesanimaux, différence qui est lié à la première et dont le rapport est introduit par le principe souvent présent chezAristote selon lequel la nature ne fait rien en vain.Que signifie ce principe? Que la nature, comprise ici comme puissance d'engendrement, ne dote pas les êtres qu'elleengendre de certaines caractéristiques au hasard, mais leur attribue les qualités dont ils ont besoin.

Ici, il s'agit dela parole.

Pourquoi les hommes en ont-ils besoin? Parce qu'ils vivent en société et que dans le cadre de la viesociale, ils ont besoin de communiquer et de s'exprimer.Suit une réponse à une objection implicite.

Laquelle? L'homme n'est pas le seul être capable de communiquer puisqueles animaux ont eux aussi cette faculté.

C'est ici qu'intervient une distinction importante entre la voix et la parole,phonè et logos.

Les animaux peuvent communiquer entre eux, mais ce qu'ils communiquent, c'est la douleur et leplaisir et non des idées, ce qui exige non pas seulement d'avoir une voix, mais d'avoir la parole.

Or, l'homme, pourvivre en cité a besoin de l'expression d'idées et non pas seulement du plaisir et de la peine, c'est pourquoi selonAristote il est doué de la parole.Il faut toutefois observer que si l'homme est doué de parole pour vivre en cité, avec les autres, il ne devient eneffet parlant que par la vie sociale : sans elle, l'homme a sans doute la faculté de parler, mais il ne la réalise, nel'actualise que dans et par la vie sociale qui pour commencer lui impose l'usage d'une langue comme moyend'expression et de communication de ses pensées.L'explication d'Aristote est finaliste : c'est en vue de la vie en cité que l'homme est doué de la parole.

C'est parcequ'il est un animal politique qu'il est doué de la parole.

Cette deuxième différence d'avec les animaux estsubordonnée à la première en cela que la parole est le moyen par lequel l'homme peut réaliser sa nature propre ausein de la vie sociale.

Cette explication a le mérité suspect de toutes les explications finalistes et en particulierélude totalement le problème que posera Rousseau de l'origine des langues : pour parler, il faut une vie sociale, pouravoir une vie sociale, il faut parler.

Du reste, Rousseau avoue ne pas savoir comment s'en sortir. 3 ) L'homme est un animal qui a des idées du juste et de l'injuste Troisième différence entre l'homme et les animaux, directement en rapport avec la précédante : l'homme a des idéesau sujet du juste et de l'injuste, idée qu'il élabore à partir de celles de douleur et de plaisir, puis d'avantageux et denuisible.

On passe donc de ce que l'on sent à l'expression de ce qui est utile ou nuisible, c'est-à-dire qu'on se met àdire ce qui procure l'une ou l'autre de ces deux sensations, à la suite de quoi on élabore les idées du bien et du mal,du juste et de l'injuste. Conclusion Aristote met donc en évidence trois différences entre l'homme et les animaux qui non seulement le distingue d'eux,mais qui de surcroît font apparaître ce qui caractérise l'homme en propre.

Définir, c'est toujours distinguer ;découvrir l'identité passe presque toujours par la mise en évidence des différences.L'homme est un animal politique, doué de la parole grâce à laquelle il peut communiquer certes, mais surtoutexprimer des idées que les animaux n'ont pas, celles du bien et du mal, du juste et de l'injuste.

On n'est donc pasloin ici de l'homme comme animal raisonnable dans la mesure où disposer du logos, c'est disposer de la parole en tantqu'elle permet d'exprimer des idées que nous ne pourrions pas avoir sans esprit ou raison.Seulement, cette définition ne doit pas cacher son ambiguïté : si elle définit l'homme en son essence, elle n'enexclut pas moins tous les membres de l'espèce humaine qui ne sont pas devenus humains parce qu'ils ne vivent pasen société politique, celle précisément où l'on s'exprime au sujet du juste et de l'injuste parce qu'on y vit selon lejuste et l'injuste.

On n'est pas un homme, on le devient par la vie sociale et politique.Or, dire que l'on ne devient un homme qu'au sein de la vie sociale, c'est dire que l'on ne devient un homme qu'ausein d'une culture déterminée puisque toutes les sociétés ont une culture propre.

Voilà pourquoi les hommes sont sidifférents les uns des autres : ils ne deviennent hommes qu'au sein d'une société, donc d'une culture, or les culturessont différentes les unes des autres et elles déterminent les individus dans leur langue, leur manières d'être, de secomporter, de penser, de sentir, de telle sorte qu'ils finissent pas tous se distinguer les uns des autres.

L'hommen'advient à lui-même qu'au sein de la culture, or la culture est dénaturante, aliénante en cela qu'elle transforme trèsfortement les individus qui sont en sont sein de telle sorte qu'elle les distingue à la fois de ceux qui appartiennent àd'autres cultures et entre eux au sein d'une même culture.Ce qui signifie donc que la question est en réalité de savoir si l'entrée au sein de la culture est une aliénation parlaquelle l'homme advient à ce qu'il est, sans l'être vraiment encore au départ du processus d'acculturation ou si elleest une aliénation sans récupération de soi, sans devenir ce que l'on est.Qu'est-ce que cela signifie que dire qu'on ne naît pas homme, mais qu'on le devient par la vie sociale qui rendpossible l'apprentissage d'une langue et l'expression d'idées? Que des membres de l'espèce pourraient ne pas êtredes hommes si faute de vivre dans une cité, ils n'apprennent aucune langue et n'expriment aucune idée de ce fait.On peut sans doute soutenir que tous les membres de l'espèce sont capables de parler, mais cette aptitude peut seperdre ou se dégrader si elle n'est pas réalisée ou actualisée dans l'apprentissage précoce d'une langue déterminée,par laquelle il sera possible d'exprimer des idées.

Faute d'une langue en effet, il est impossible d'exprimer une idée.. »

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