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Aristote

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Telle est la nature de l'équitable, qui est un correctif de la loi là où elle se montre insuffisante en raison de son caractère général. Tout ne peut être réglé par la loi. En voici la raison: pour certaines choses, on ne peut établir de loi, par conséquent, il faut un décret. En effet, pour tout ce qui est indéterminé, la règle ne peut donner de détermination précise, au contraire de ce qui se passe dans l'architecture à Lesbos avec la règle de plomb; cette règle, qui ne reste pas rigide, peut épouser les formes de la pierre ; de même les décrets s'adaptent aux circonstances particulières. On voit ainsi clairement ce qu'est l'équitable, que l'équitable est juste et qu'il est supérieur à une certaine sorte de juste. On voit par là avec évidence ce qu'est aussi l'homme équitable: celui qui choisit délibérément une telle attitude et la pratique; celui qui n'est pas trop pointilleux, au sens péjoratif, sur le juste, mais qui prend moins que son dû tout en ayant la loi de son côté, est un homme équitable, et cette disposition est l'équité, qui est une forme de justice et non une disposition différente. Aristote

« "Telle est la nature de l'équitable, qui est un correctif de la loi là où elle se montre insuffisante en raison de son caractère général.

Tout ne peut être réglé par la loi.

En voici la raison: pour certaines choses, on ne peut établir de loi, par conséquent, il faut un décret.

En effet, pour tout ce qui est indéterminé, la règle ne peut donner de détermination précise, au contraire de ce qui se passe dans l'architecture à Lesbos avec la règle de plomb; cette règle, qui ne reste pas rigide, peut épouser les formes de la pierre ; de même les décrets s'adaptent aux circonstances particulières. On voit ainsi clairement ce qu'est l'équitable, que l'équitable est juste et qu'il est supérieur à une certaine sorte de juste. On voit par là avec évidence ce qu'est aussi l'homme équitable: celui qui choisit délibérément une telle attitude et la pratique; celui qui n'est pas trop pointilleux, au sens péjoratif, sur le juste, mais qui prend moins que son dû tout en ayant la loi de son côté, est un homme équitable, et cette disposition est l'équité, qui est une forme de justice et non une disposition différente." ARISTOTE. Questions 1.

a.

Quelle est la thèse retenue par Aristote? b.

Comment l'établit-il? 2.

a.

En quoi le «caractère général» de la loi appelle-t-il un «correctif»? Qu'apporte à l'analyse l'image de la règle de plomb? b.

Expliquer: «l'équitable est juste et (...) il est supérieur à une certaine sorte de juste». c.

En quoi consiste la pratique de l'homme équitable? 3.

Peut-on appliquer la loi de manière injuste? Question 1 a.

Aristote nous propose dans ce texte une réflexion tout en finesse sur la justice, plus exactement sur ses diverses formes.

Il appelle «équité» la justice qui consiste à corriger ou compléter la loi là où, en raison de sa nécessaire généralité, elle n'est pas directement applicable à telle ou telle situation particulière.

L'équité est requise là où l'application de la loi semble indéterminée.

En cela, l'équité parachève la loi et lui permet d'épouser le concret.

Sans cette forme de justice, la loi demeurerait un principe abstrait, une généralité rarement applicable.

En ce sens, Aristote estime, et c'est là la thèse du texte, que la justice d'équité est supérieure à la justice strictement légale. b.

La première phrase formule l'idée directrice du texte qui est ensuite démontrée en deux temps.

La raison avancée est que «tout ne peut être réglé par la loi».

La justification de cette raison, second temps de l'argumentation, sera plus longue et s'appuiera sur la comparaison de l'équité et de la règle de Lesbos (jusqu'à «...

circonstances particulières»).

La dernière phrase du premier paragraphe conclut le raisonnement et reformule l'idée directrice sous la forme d'un jugement de valeur qui correspond à la thèse du texte.

La seconde partie du texte (second paragraphe) ne poursuit pas l'argumentation de la première partie.

Elle envisage de nouveau la notion d'équité, non plus de manière générale, mais sous la figure de l'«homme équitable».

Ce changement de point de vue ne rectifie pas ce qui a été dit de l'équité dans le premier paragraphe. Question 2 a.

Une loi, par définition, est un énoncé général.

Ce qu'elle interdit ou ordonne est censé être respecté par tous les individus qui en dépendent.

La loi formule un principe et ne prend pas en considération les circonstances de son application.

Il faut bien, pourtant, que la loi s'applique à la réalité concrète.

Or Les individus ainsi que les situations sont toujours singuliers.

Une application mécanique et aveugle de la loi aux circonstances particulières donnerait lieu à de profondes injustices.

Les décisions du législateur ou du juge (les «décrets») doivent s'efforcer d'adapter la loi générale à la réalité concrète des situations humaines, toujours complexes.

En un sens, un crime est un crime.

En tant qu'infraction de la loi, il ne peut qu'être sanctionné.

En un autre sens, un crime n'est pas un crime: il n'existe pas deux crimes identiques.

Les mobiles, les motifs, les circonstances...

sont singuliers et la décision du degré de culpabilité du criminel suppose de tenir compte de ces facteurs.

Le «correctif» dont parle Aristote ne correspond donc pas nécessairement à une suspension de la loi (le crime, par exemple, ne serait pas condamné, comme dans un cas de légitime défense ou d'irresponsabilité pénale; il s'agit plutôt de son aménagement, de la nécessaire adaptation de sa lettre pour que son esprit soit conservé dans des contextes très divers. Cette nécessaire adaptation aux particularités concrètes conduit Aristote à comparer l'équité à la règle de Lesbos, règle dont la souplesse permettait de mesurer les courbes.

Car dans la réalité architecturale, il n'existe pas que des plans et des lignes droites.

Les angles, les courbes des murs par exemple réclament du géomètre des instruments permettant d'affiner la mesure au cordeau, prise en ligne droite.

L'équité, par ses «correctifs», rend la justice plus précise, plus exacte, donc plus juste. b.

L'équité ne représente donc pas une justice alternative à celle de la loi: elle est le prolongement de la justice légale. Sa supériorité tient au fait qu'il s'agit non pas d'une justice abstraite et appliquée aveuglément («une certaine sorte de juste»), mais au contraire d'une justice élaborée raisonnablement aux dimensions du cas particulier auquel elle. »

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