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Albert le Grand

Publié le 22/02/2012

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Albert de Bollstädt ou Albert le Grand, qui est avec saint Thomas le représentant le plus illustre de l'Ordre des Dominicains au XIIIe siècle, se donna pour but d'introduire dans la culture chrétienne, sous les auspices du Péripatétisme, la science grecque, arabe et juive dont on découvrait alors toute la richesse. On divise habituellement son oeuvre en quatre parties : la Summa de creaturis (1245-1250), le Commentaire des sentences, de la même époque, un groupe de 21 traités où il expose l'ensemble du Péripatétisme (de 1250 à 1270 environ) et la Summa Theologica (1270). En fait, Albert le Grand a de la philosophie péripatéticienne une idée fort large : il accueille, en effet, comme représentants de l'École, après Aristote, tout à la fois, Alexandre d'Aphrodisias, Thémistius, Porphyre, Denys l'Aréopagite, les Arabes (sauf Averroès), des Juifs comme Moïse Maimonide, etc. C'est probablement cette soif de savoir qui a conduit Albert à transformer les rapports entre la philosophie et la théologie. Sans doute le dernier mot reste-t-il toujours à la théologie, au dogme révélé ; mais les droits de l'analyse philosophique sont jalousement sauvegardés. Par exemple à propos du problème de la création du Monde : sur le plan du dogme, Albert admet, avec saint Augustin, que le Monde a été créé par un acte volontaire de Dieu ; mais dès qu'il parle en philosophe, il attaque vivement l'augustinisme et accorde sa préférence à une explication " péripatéticienne ", en réalité néo-platonicienne, d'après laquelle la création procède de Dieu selon un ordre nécessaire, sans acte créateur. De plus commencent à se circonscrire certains domaines (physique, médecine, etc.), où prévaudra désormais une analyse purement conceptuelle, donc philosophique et non théologique. Toutefois Albert le Grand n'est pas simplement un compilateur ou un commentateur ; les doctrines qu'il rencontre ne s'accordent pas toujours avec les dogmes chrétiens, et il lui faut chercher des solutions originales. Témoin l'immortalité individuelle de l'âme qu'Albert soutient vigoureusement contre Averroès ; si l'on admet en effet avec Aristote que la matière est le seul principe d'individuation, il est impossible de soutenir philosophiquement l'idée d'une destinée individuelle post mortem pour chaque âme ou chaque intelligence humaine. Aussi Albert cherchera-t-il un principe d'individuation à l'intérieur de l'intelligence elle-même : il distinguera l'intellect possible, sorte de donnée initiale brute, qu'il nomme (d'après Proclus) une " hyliathis " ou quasi-matière, et l'intellect agent, lumière venue de Dieu, qui ne nous appartient donc pas, et qui façonne l'intellect possible. C'est sur ce dernier, une fois qu'il aura été conduit de puissance en acte par l'intellect agent, que reposera l'immortalité individuelle. Il était naturel que cette oeuvre si variée exerçât une influence durable, et sans parler de saint Thomas, on peut, de fait, en suivre les traces jusqu'aux grands mystiques rhénans, Maître Eckhart et Nicolas de Cues.

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