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Alain: Droit et Propriété

Publié le 12/04/2005

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Le droit est ce qui est reconnu comme droit. Reconnu, c'est-à-dire approuvé ou prononcé par un pouvoir arbitral, et toutes portes ouvertes. Faute de quoi il n'y a jamais qu'un état de fait, devant lequel le droit reste suspendu. Posséder une montre, l'avoir dans sa poche, y trouver l'heure, ce n'est qu'un état de fait. Avoir droit de propriété sur la montre, c'est tout à fait autre chose ; revendiquer ce droit c'est s'adresser à l'arbitre dans un débat public ; c'est plaider et tenter de persuader. Le fait que le voleur possède la montre ne décide ement de la propriété. Pareillement pour une maison. L'occuper, faire acte de possesseur, ce n'est ement fonder un droit. On sait qu'il y a présomption de droit si j'occupe trente ans sans opposition ; mais cela même doit être décidé par arbitre et publiquement. Tant que le droit n'est pas dit de cette manière solennelle et impartiale, il n'y a jamais que possession, c'est-à-dire simple fait. Alain
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« Pour que le droit soit reconnu, il doit être défini par un tribunal qui juge « toutes portes ouvertes ».

Le sens decette expression est précisé par d'autres formules du texte.

L'arbitrage ne définit le droit que s'il y a eu d'abord «débat public », c'est-à-dire si toutes les parties concernées ont pu exposer contradictoirement leurs causes devantle tribunal et en présence de témoins.

Autrement dit, les adversaires ont dû «plaider et tenter de persuader »,soutenir et/ou contester les arguments en présence, de sorte que les juges ont connaissance des positions de tous.Si ces conditions n'étaient pas réalisées, l'impartialité des juges pourrait légitimement paraître insuffisante, le droitne serait plus reconnu par tous. Accepteriez-vous de dire, avec l'auteur, que dès que le droit est reconnu, « il n'y manque rien ». Éléments de réflexion :• Dès que le droit est reconnu, « il n'y manque rien » : pour Alain, cela signifie que le droit reste le droit même s'iln'est pas appliqué dans les faits par un « pouvoir d'exécution », par des « gendarmes », donc par une force quitraduirait l'idée dans la réalité.Cette position appelle un certain nombre de remarques. 1 – Le droit sans la force « La justice sans la force est impuissante (...), contredite, parce qu'il y a des méchants ».

Bien plus, « la justice estsujette à disputes » (Pascal, éd.

Brunschvicg, n° 298), de sorte que la simple affirmation du droit, sans puissancepour le faire respecter, n'est suivie d'aucun effet.

Le droit idéal proclamé, mais seulement proclamé, laisse le champlibre aux forts, s'ils s'en moquent.

On peut même se demander si, puisqu'il fait le jeu de ceux qui ont le pouvoir de luidésobéir, ce droit n'est pas complice de l'injustice qu'il dénonce.

L'idéalisme, en tout cas, ne peut-il être le refugequi masque l'impuissance ? 2 – La force sans le droit « Il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi (...).

La force est très reconnaissable ».

Mais aussi, « laforcesans la justice est tyrannique » (Pascal).

C'est pour dissimuler sa tyrannie que la force ne se manifeste presquejamais ouvertement.

Elle se justifie, elle se dit tout à fait conforme au droit :• La Fontaine : Le Loup et l'agneau, « La raison du plus fort est toujours la meilleure.

»• Pascal : « La force a contredit la justice et a dit qu'elle était injuste, et a dit que c'était elle qui était juste.

Etainsi, ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste » (ibid.).• Rousseau : « Le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître, s'il ne transforme sa force en droit,et l'obéissance en devoir » (Contrat social, I, 3).

Mais cette transformation n'est jamais légitime. 3 – Contradiction du « droit du plus fort » Rousseau : « Céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté ; c'est tout au plus un acte de prudence(...).

S'il faut obéir par force, on n'a pas besoin d'obéir par devoir ; et si l'on n'est plus forcé d'obéir, on n'y est plusobligé.

On voit donc que ce mot de droit n'ajoute rien à la force ; il ne signifie ici rien du tout.

Obéissez auxpuissances.

Si cela veut dire : cédez à la force, le précepte est bon, mais superflu ; je réponds qu'il ne sera jamaisviolé » (ibid.). 4 – La « force » paradoxale du droit • Dès que c'est la « crainte du gendarme » qui contraint à ne pas enfreindre une loi, est-ce encore parce qu'elle estjuste (quand elle l'est) qu'on lui obéit ? Ne sort-on pas déjà de la sphère du droit ?• Si la force fait appel au droit pour « justifier » ses entreprises, ne manifeste-t-elle pas une certaine faiblesse et nereconnaît-elle pas au droit une certaine autorité ? Cette autorité est source d'obligation, non de contrainte, on estlibre de ne pas la respecter et on choisit librement de s'y soumettre.. »

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