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ALAIN (1868-1951) Propos sur le pouvoir.

Publié le 22/04/2010

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« Voter, ce n'est pas précisément un des droits de l'Homme ; on vivrait très bien sans voter, si l'on avait la sûreté, l'égalité, la liberté. Le vote n'est qu'un moyen de conserver tous ces biens. L'expérience a fait voir cent fois qu'une élite gouvernante, qu'elle gouverne d'après l'hérédité, ou par la science acquise, an-ive très vite à priver les citoyens de toute liberté, si le peuple n'exerce pas un pouvoir de contrôle, de blâme et enfin de renvoi. Quand je vote, je n'exerce pas un droit, je défends tous mes droits. Il ne s'agit donc pas de savoir si mon vote est perdu ou non, mais bien de savoir si le résultat cherché est atteint, c'est-à-dire si les pouvoirs sont contrôlés, blâmés et enfin détrônés dès qu'ils méconnaissent les droits des citoyens. On conçoit très bien un système politique, par exemple le plébiscite (1), où chaque citoyen votera une fois librement, sans que ses droits soient pour cela bien gardés. Aussi je ne tiens pas tant à choisir effectivement, et pour ma part, tel ou tel maître, qu'à être assuré que le maître n'est pas tant le maître, mais seulement le serviteur du peuple. C'est dire que je ne changerai pas mes droits réels pour un droit fictif. «

Le thème : Le sens du vote.

La thèse : Le vote est moins un droit de l'Homme qu'un moyen pour préserver des droits. L'exercice du vote est un pouvoir de contrôle, voire de sanction, relatif au respect des droits des citoyens par un pouvoir politique.

Les enjeux : L'expression « le droit de vote « est couramment utilisée. Nul ne songe à remettre en cause le vote comme droit. Bien plus, tout système politique qui bannirait le vote serait condamné par la communauté internationale. Néanmoins, que garantit le vote ? N'y a-t-il pas des votes truqués ? Le vote apparaît comme l'expression de la volonté d'un peuple, mais qu'en est-il ? Le vote n'est-il pas également un devoir ? Alain s'interroge sur le sens réel du vote et défend l'idée du vote comme moyen d'action politique qui se révèle être un pouvoir plus qu'un droit. En quoi le vote est-il un droit, un devoir, un pouvoir ? Bien plus n'est-ce pas la question de l'action politique du citoyen qui se pose à travers la thèse d'Alain ?

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« Le vote : un droit pour conserver des droits a) Voter : droit de l'homme ?Dans le premier mouvement du texte, Main écrit que le vote « n'est pas précisément un des droits de l'Homme » etque l'on pourrait vivre sans voter si les trois biens que représentent la sûreté, l'égalité et la liberté étaientpréservés.

Cette conception du vote peut étonner face à l'habitude de vie dans des états de droit où l'on parlecouramment du droit de vote et où notre histoire témoigne des combats pour l'obtenir.

L'auteur ne remet pas encause le droit de vote mais le sens de celui-ci.

Les trois biens cités sont effectivement les premiers droits.

Ainsi ladéclaration préfixée à la Constitution du 24 juin 1793 (An I) indique dans l'article 2 : « Les droits sont l'égalité, laliberté, la sûreté, la propriété.

» La déclaration du 5 fructidor An III inscrira dans son premier article : « Les droits del'homme en société sont la liberté, l'égalité, la sûreté, la propriété.

» La Déclaration universelle des droits de l'hommede 1948 reprend dans son article 3 la liberté et la sûreté comme droits.

Le vote est un moyen de conserver sesdroits, s'ils ne sont pas assurés.

Main a recours à un argument par l'exemple dans lequel l'expérience montre quequel que soit le type de gouvernement, monarchique ou démocratique, ces biens peuvent être remis en cause.

Lepeuple doit pouvoir par le vote sauvegarder ces droits.

Le vote n'est pas précisément un des droits de l'Homme, carces droits sont issus d'une conception d'un droit naturel universel dicté par la droite raison.

Ils relèvent donc d'uneidée de la morale, de la justice, de la paix qui défini un système de valeurs.

Le vote relève de la capacité juridique àcontraindre un gouvernement à démissionner.

Le vote est un acte politique, les droits sont des valeurs de la raisonet de la morale. b) Le vote est un droit réelLe vote, dès qu'il s'exerce passe d'un droit formel à un droit réel.

Ainsi le second mouvement du texte montre lesens du vote.

Il est le moyen légal par lequel le peuple contrôle le gouvernement.

Ce contrôle du citoyen sur legouvernement est un des soucis majeurs issus de la Révolution française.

Il sera même prévu un droit à l'insurrectiondans la déclaration préfixée à la Constitution du 24 juin 1793 (An I) : « Quand le gouvernement viole les droits dupeuple, l'insurrection est pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plusindispensable des devoirs » (article 35).

Le vote signifie que les pouvoirs sont contrôlés, blâmés, détrônés.

Le votes'avère être une véritable arme politique. c) Voter, c'est sauvegarder des droitsAinsi le résultat d'un vote se mesure non pas à l'accession au pouvoir de tel ou tel individu mais à la sauvegarde durespect des droits des citoyens.

Le troisième mouvement du texte indique le contenu du vote.

Ce n'est pas pour unmaître que l'on vote mais pour « un serviteur du peuple ».

La personnalisation du pouvoir politique et des campagnesélectorales faussent donc le sens du vote.

Alain réitère l'idée du vote comme moyen de défense de droits réels sinonle droit de vote reste fictif.

Un vote libre peut amener au pouvoir un gouvernement qui peut confisquer les droitsdes citoyens.

Le vote n'est pas en soi une garantie, encore faut-il lui donner un sens.

« Les droits réels » peuventdonc s'interpréter comme la liberté, l'égalité et la sûreté.

Kant nous dit dans La Doctrine du droit (ire partie), que «La liberté (l'indépendance de l'arbitre nécessitant d'autrui) dans la mesure où elle peut subsister avec la liberté detout autre suivant une loi universelle, est cet unique droit originaire revenant à l'homme de par son humanité ».

Ilindiquera dans le même passage l'égalité et la non nuisance à autrui comme des principes inclus dans la liberté.

Cesont ces valeurs dont Main nous dit toute la nécessité de les conserver par le vote. Transition : À travers la question du vote entendu comme exercice d'un pouvoir de contrôle des instances gouvernementales, c'est le problème de la possible action politique du citoyen qui se pose. Deuxième partie Quelle est l'action politique possible du citoyen ? a) Le voteL'État constitutionnel ou l'État de droit garantit des droits au citoyen, mais celui-ci peut être politiquement passif.Ne serait-ce que parce qu'un grand nombre d'entre nous ne gouverneront jamais.

Le partage entre citoyens passifset actifs pourrait se faire entre ceux qui exercent des responsabilités politique et ceux qui n'en auront jamais.

Laseule action politique serait donc le vote.

Mais si le vote est un droit, on a aussi le droit de ne pas l'exercer.

Ne pasvoter n'est pas puni par la loi.

Partant, la seule activité politique du citoyen se limiterait aux consultationsépisodiques.

De plus, le sens du vote n'apparaît pas dans l'acte de voter.

Le vote peut être l'expression d'uneréaction : on donne une opinion, qui peut sans cesse évoluer au gré des intérêts de chacun.

C'est peut être aussidans ce sens-là que Main parle d'un « droit fictif ».

Il n'y a pas ici à proprement parler une action mais plutôt uneréaction, un mouvement désordonné.

Le vote semble relever d'une véritable action politique lorsque le citoyenparticipe à la discussion politique, s'informe, lit et écrit, use de ce que Kant appelle « l'usage public de sa raison »,c'est-à-dire porte sur la place publique ses réflexions (par écrit) en tant que spécialiste d'une question.

De mêmelorsque le citoyen informe son député ou son ministre des dysfonctionnements du pouvoir, exerçant par là, autantque par le vote, son moyen de contrôle des instances gouvernantes.

Un tel citoyen vote en fonction d'un projet.Mais il faut reconnaître deux limites à cette action politique, à ce sens noble du vote.

La première est la nécessitéd'avoir le temps, la seconde d'être éduqué à cette activité.

Ce ne peut être le cas de tous les citoyens.

De plus, levote apparaît comme un moment limité de l'action politique. b La participation active. »

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