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A-t-on raison d'estimer que l'écriture a plus de valeur que la parole ?

Publié le 27/02/2008

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Le savoir serait alors la trace d?un logos originaire qu?il nous incombe de dé-couvrir. L?écrit fait disparaître l?acte de compréhension.   III.                La parole est mon corps en tant qu?il s?exprime   La parole ne saurait se réduire à un seul acte de pensée. Si l?écriture semble avoir un statut ontologique plus stable que la parole, celle-ci n?en revêt pas moins un statut ontologique de valeur par ce qu?il a à nous apprendre. La parole se rapporte au corps : elle est mon corps en tant qu?il s?exprime. Elle serait donc l?expérience fondamentale du langage, celle qui inscrit le sujet dans le monde.  Dans la Phénoménologie de la perception, Merleau-Ponty replace la parole qui articule la pensée dans le langage dans la problématique du corps. La parole est un geste et non pas un signe, comme le mot : c?est parce qu?en elle la signification n?est jamais achevée. Si richesse vient donc de ce que l?on reconnaît que le sens n?est pas un objet, il ne se réduit pas à l?objet, il est sans cesse en élaboration dans le monde.

« signification, c'est à dire du sens en tant qu'il résulte de mon rapport au monde, que le passage au corps, au geste,à la parole est antérieur à la reconnaissance de la signification, et qu'il y a du sens dans la parole comme geste. Si la parole est l'expérience fondamentale de l'être au monde, doit-on pour autant considérer que l'écrit ure est uneexpérience qui nous place en retrait du monde de par son caractère différé ? L'écriture épistolaire, par exemple, nepourrait-elle pas nous fournir un exemple d'une autre temporalité de la communication ? Voir la correspondance deDiderot à Sophie Volland. Il y a spontanément croyance au privilège de l'écriture sur la parole.

Depuis la sagesse populaire « les paroless'envolent, les écrits restent » (où l'écrit témoigne solidement du droit face à l'aspect incertain de la simplepromesse verbale), jusqu'à l'approche anthropologique (distinction faite par Lévi-Strauss entre les sociétés froidesnon cumulatives, sans écriture et les sociétés chaudes, à écriture : les premières végètent en se répétant, lessecondes ouvrent puis accélèrent le temps de l'histoire).

L'écriture permet : 1.

l'inscription de la parole - 2.l'archivage des pensées (avec jadis la bibliothèque et aujourd'hui les banques de données) - 3.

la capitalisation dusavoir (du même coup la reproduction des connaissances anciennes facilite la production de nouvellesconnaissances).

En perdant l'écriture, la pensée perdrait ces caractéristiques : la possibilité de s'inscrire, des'archiver, de se capitaliser.

Elle resterait toujours seulement « au présent » (ou dans le strict temps de la mémoiredes générations vivantes), au lieu de pouvoir s'échanger dans le temps et dans l'espace. A titre individuel, l'écriture permet un niveau de langue plus élevé (le « parler comme un livre » qui s'oppose auspontané et au décousu du « style parlé »).

La pensée est formulée plus strictement (la langue écrite est plusabstraite que la langue parlée plus émotionnelle ; dans l'écrit, l'effet de persuasion est obtenu plus parl'enchaînement des raisons que par l'expression de la passion).

La pensée sans écriture est « emportée » par letemps même du discours (la possibilité de revenir au texte écrit - et sur le texte écrit - s'oppose à l'irréversibilité dudiscours). Mais la prééminence de l'écriture est déjà mise en question par Platon dans Phèdre, avec le thème de l'invention del'écriture par le dieu égyptien Thot à la figure d'ibis, et la réplique du roi Thamous, pour lequel l'écriture, loind'accroître la science et la mémoire, « produira l'oubli dans les âmes en leur faisant négliger la mémoire ».

Avecl'écriture, les hommes auront « la présomption de la science, non la science elle-même.

Ils ne seront le plus souventque des ignorants de commerce incommode, parce qu'ils se croient savants sans l'être ». La pensée, avec l'écriture, perd la confrontation des idées telle qu'elle s'exerce avec profit dans le dialogue et « lesdiscussions bienveillantes ».

La pensée vivante naît de la confrontation, l'écriture est simple conservatoire.

Cf.Platon, Phèdre : « Tout homme sérieux se gardera bien de traiter par écrit des questions sérieuses.

» C'est dans cette ligne qu'on trouve également chez Rousseau une critique de l'écriture : « Les langues sont faitespour être parlées, l'écriture ne sert que de supplément à la parole.

» Plus encore, l'écriture altère la langue : « Ellen'en change pas les mots mais le génie ; elle substitue l'exactitude à l'expression » ou encore « L'on rend sessentiments quand on parle, et ses idées quand on écrit» (Essai sur l'origine des langues).

En perdant l'écriture, lapensée perdrait donc la précision et son caractère abstrait : à la limite, la pensée tout entière se perdrait (au profitdes sentiments et de leur expression). La question de l'étroite relation entre pensée et écriture passe certes par la médiation du langage.

Mais plus dulangage artificiel (comme celui de la logique formelle) que du langage naturel, le langage formel et symbolique étantdirectement écriture de la pensée.

D'où déjà le projet, avec Leibniz, d'une « caractéristique universelle » (pouvoir «trouver des caractères ou signes propres à exprimer toutes nos pensées, aussi nettement et exactement quel'arithmétique exprime les nombres »). « Socrate : L'écriture, Phèdre, a un grave inconvénient, tout comme la peinture.

Les produits de la peinture sont comme s'ils étaient vivants ; mais pose-leur une question, ils gardent gravement le silence.

IL en est de même desdiscours écrits.

On pourrait croire qu'ils parlent en personnes intelligentes mais demande-leur de t'expliquer cequ'ils disent, ils ne répondront qu'une chose, toujours la même..

Une fois écrit, le discours roule partout et passeindifféremment dans les mains des connaisseurs et dans celles des profanes, et il ne sait pas distinguer à qui ilfaut, à qui il ne faut pas parler.

S'il se voit méprisé ou injurié injustement, il a toujours besoin du secours de son. »

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