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La détermination du blanchiment d'argent

Publié le 22/11/2023

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« P remier Chapitre : LA DETERMINATION DU BLANCHIMENT DE CAPITAUX Il ressort de la définition juridique du blanchiment de capitaux que l’infraction de blanchiment obéit à deux conditions : une condition préalable et des conditions nécessaires. En premier lieu, la condition préalable est l’accomplissement d’un crime ou d’un délit ayant permis à son auteur de se procurer des biens ou des revenus.

En dehors de cette condition, il n’est point besoin d’apprécier les autres, même si leurs existantes sont établies.

Cependant, cette condition préalable soulève une question.

En effet, comment qualifier l’origine criminelle des biens si l’auteur de cette infraction préalable n’avait pas été poursuivi ou condamné ? A cet égard, il convient de relever que la définition du blanchiment de capitaux pose une véritable présomption comme le fait observer le Professeur Wilfrid Jeandidier1 En deuxième lieu, les conditions nécessaires pour la réalisation du blanchiment de capitaux sont cumulativement : la conscience de l’origine criminelle des biens et les différentes étapes qui constituent le processus du blanchiment. Les biens d’origine criminelle auxquels il est fait allusion ici sont définis comme «l’ensemble des droits et des choses matérielles qui composent le patrimoine d’une personne»2 et qui sont acquis de façon illicite ou illégale. Parmi tous ces biens, l’argent est le plus souvent concerné par le blanchiment. C’est pourquoi la plupart des ouvrages traitent du blanchiment d’argent et non du blanchiment de capitaux.

C’est également pour cela que les mesures de lutte contre le blanchiment visent en priorité les organismes financiers.

Il est donc nécessaire afin de déceler les manifestations du phénomène de blanchiment dans les circuits financiers d’étudier les différentes catégories 1 2 JEANDIDIER (W), Droit pénal des Affaires, Paris, Dalloz, 3e édition, 1998, p.

82 Le Droit de A à Z, Le dictionnaire juridique pratique, Paris, Editions Juridiques Européennes, 1997, p.

75 d’argent (Première section) mais également le processus de blanchiment de capitaux ( Seconde section). PREMIERE SECTION : LES DIFFERENTES CATEGORIES D’ARGENT Le blanchiment trouve ses sources dans l’économie parallèle.

La multiplication des appellations qui caractérise cette économie - économie noire, économie informelle, économie cachée, travail au noir - nous renvoi au flou qui entoure ces concepts.

On mélange souvent l’argent « noir » et l ‘argent « sale » alors que leurs objectifs sont souvent différents. Premier Paragraphe : L’argent noir est un détournement de la légalité L’argent noir est le fruit des activités légales mais non déclarées.

Il est donc acquis par un détournement de la légalité.

Deux activités permettent d’accomplir cet acte de détournement : l’évasion des capitaux et la fraude fiscale. A- L’EVASION DES CAPITAUX : Elle est observée lorsque les conditions politico-économiques de l’Etat concerné ne permettent pas un rapport risque sur bénéfice favorable pour les investisseurs.

Son corollaire est le secret financier qui assure la discrétion dans la fuite des capitaux.

L’évasion des capitaux est digne d’intérêt en ce sens qu’elle explique notamment l’existence de marchés ‘’offshore 3’’ qui bénéficient également aux blanchisseurs comme aux simples contribuables désireux d’éviter seulement le fisc national. Le centre offshore ou paradis fiscal est défini d’après MARSHALL J. Lauger comme « un lieu pouvant être utilisé comme refuge contre les impôts ...»4.

Le Professeur Harvery P.

Dale le définit comme « N’importe quel bout de terrain découvert à marée basse et qui n’a pas besoin, d’impôts »5.

En effet, les banques ou autres institutions ‘’offshore’’ sont exemptées d’un grand nombre de règles.

Ainsi pour le Professeur Peter S.

Crook 6, les centres 3 4 5 Expression anglaise signifiant ‘’extraterritorialité’’ LAVOISIER (L), Les paradis fiscaux, Paris, PUF, Collection Que sais-je ?, 2e édition, 1992, p.12 JEREZ (O), Le blanchiment d’argent, Paris, Revue Banque, 1998, p.81 financiers ‘’offshore’’ offrent « des libertés des services et des occasions ». Mais dans certains cas, ces mêmes impositions peuvent être objet de fraude. B- LA FRAUDE FISCALE : La forte implication de l’Etat dans l’économie et la forte pression fiscale en vigueur dans de nombreux pays ont sans doute multiplié sensiblement les incitations à éviter ou à frauder l’impôt. La fraude fiscale est « une soustraction illégale à la loi fiscale de tout ou partie de la matière imposable qu’elle devrait frapper »7 L’élément matériel de la fraude fiscale est double : la soustraction frauduleuse à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts et des moyens permettant d’obtenir le résultat illicite. En règle générale, la fraude fiscale consiste à dissimuler l’existence d’un revenu légal, soit à en déguiser la nature en le faisant passer pour non imposable.

Dans un cas comme dans l’autre, le revenu légal devient illégal 8.

Le blanchiment de l’argent est le procédé inverse.

Il consiste à donner une apparence de légalité à un revenu illégal.

Et cette manœuvre peut être faite par l’opération de paiement de l’impôt. En effet, contrairement au fraudeur, le blanchisseur ne doit surtout pas essayer de se soustraire à l’impôt.

Au contraire, ‘’fiscaliser’’ l’argent sale est l’une des meilleures manière de le blanchir ; il n’a jamais été au nombre des préoccupations premières de l’Administration fiscale de débusquer ceux qui paient plus d’impôt qu’ ils ne doivent9. En définitive, l’argent « noir » représente un détournement de la légalité. Cependant il n’a pas la même nature et la même ampleur que l’argent « sale ». 6 7 8 9 CROOK (P) (S), The offshore Sector, Communication à la réunion de l’équipe spéciale d’action financière pour les Caraïbes consacrée aux typologies, Trinidad 25-26 mars, 1998, p.1 GUILLIEN (R) et VINCENT (J), (sous la direction de GUINCHARD Serge et MONTAGNIER Gabriel), Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 4e édition, 1998, p.

263 BLUM (J) (A) et consorts, Paradis financiers, secrets bancaires et blanchiment d’argent, New York, Nations Unies, Bulletin d’information n° double 34-35, 1992, p.

82 FULGERAS (A-J), Affaire à suivre, Paris, Albin Michel S.A, 2002, p.

190 Second Paragraphe : L’argent sale est le fruit d’activités illicites L’argent sale est le fruit d’activités illégales, délictueuses et/ou criminelles.

Il existe deux catégories d’argent sale : l’argent du trafic des stupéfiants et l’argent du crime organisé ou l’argent qui est le produit de toutes les autres infractions graves. A- LE TRAFIC DE STUPEFIANTS : Le trafic des stupéfiants concerne les substances psychotropes notamment la drogue dure.

Olivier Jerez distingue quatre grandes familles de drogue naturelle : la famille des opiacés et ses dérivés, la cocaïne, le cannabis et les narcotiques de synthèse10.

Ce fléau touche les jeunes pour la plupart qui entrent souvent dans la dépendance de la toxicomanie avec toutes ses conséquences. Déjà en 1996, l’Observatoire Géopolitique des Drogues 11 avait observé une confirmation voire une accélération des tendances depuis la fin de la décennie : développement de la production et de la commercialisation de toutes les drogues, multiplication des relations d’affaire et des « échanges de service » entre les organisations criminelles de toutes les régions du monde. C’est cette situation préoccupante qui a fait dire à François Mitterrand, juriste de formation et alors Président de la République Française, lors de la célébration du centième anniversaire de la proclamation des Droits de l’homme le 26 août 1989 que « la puissance meurtrière des trafiquants de la drogue s’installe en pouvoir concurrent des Etats et prend rang dans les organisations internationales du crime »12. Ainsi ce trafic représenteraient « 8 à 10 % du commerce mondial »13 et sont indistinctement réintroduits sous forme de placements légaux dans le système financier.

Son chiffre d’affaire serait « largement supérieur au chiffre d’affaire mondial du pétrole et progresserait même de 10 à 20 % l’an »14.

Plus 10 11 12 13 14 JEREZ (O), Le blanchiment d’argent, Paris, Revue Banque, 1998, p.

34 Observatoire Géopolitique des Drogues, Paris, Edition la découverte, 1995 ; Cité par JEREZ (O), op.

cit., p.

46 Le Monde, 26 août 1989 DE BRIE (C), Dans l’archipel planétaire de la criminalité financière : Etats, mafias et transnationales comme larrons en foire, Le Monde diplomatique, N° 554-47ème année, avril 2000, p.5 JEREZ (O), Le blanchiment d’argent, Paris, Revue Banque, 1998, p.

35 récemment, le Représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest 15 s’est préoccupé au cours d’une conférence de presse organisée à Dakar le 25 mai 2007 de l’ampleur du trafic de drogue dans la région suite à la prise de plus de deux tonnes de drogue en provenance de l’Amérique latine les huit derniers mois. Dès lors, la conquête des marges bénéficiaires par les organisations du crime est aisément compréhensible et l’ampleur du risque de blanchiment en aval est mise en évidence.

Le volume d’espèces en circulation incite en effet, les criminels à faire appel aux professionnels du droit et de la finance qui les conseillent et gèrent leurs capitaux.

Il est donc clair que « le lien qui unit les drogues et l’argent est absolu ; ce qui est certain, c’est que la réussite spectaculaire des trafiquants internationaux est directement proportionnelle à leur capacité à blanchir leurs profits »16. La drogue sans doute longtemps, le premier poste de ce volume d’argent souterrain n’est plus aujourd’hui la source principale du blanchiment ;.... »

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